Jouany du Désert, le tuilier des plots
1690, en Cévennes, depuis la révocation de l'Edit de Nantes, en 1685, les prédicants remplacent les pasteurs exilés en Suisse, en Allemagne...
Les colporteurs diffusent bibles, lettres pastorales de Jurieu.
Février 1690, un bruit court... Dautun, pasteur à Saint Privat de Vallongue et Durand, pasteur de Génolhac, émigrés en Suisse, seraient de retour... peut-être pour préparer une insurrection.
Vigne, un notaire de Vialas, écarté d'une succession, dénonce aux autorités une réunion en leur présence, à l'Espinas, sur la route des crêtes.
Cette délation déclenche arrestations, tortures, condamnations...
A Génolhac, le chirurgien Louis Leyris et Jacques de Roche sont condamnés aux galères. Ils y mourront.
Interrogatoires, perquisitions se succèdent...
24 septembre 1690, six heures du matin...
Le capitaine Delacourt du régiment de Chambonnas, avec un sergent et quatre soldats, en garnison à Gourdouze perquisitionnent la tuilerie de Jouany, absent ce jour là... Sa femme, Catherine Rieu, surprise, cache un livre dans sa jupe.
> "Tient une maison.... et taullière, appelée Lou Plos"
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Extrait du procès verbal du 24 septembre 1690
"… nous avons trouvé, près de la poutre, un petit sac où il y avait six livres de psaume notés, et nous sommes aperçus que la femme du dit Jouany cachait un livre dans sa jupe, intitulé "Les Actes des Apôtres", au milieu duquel il y avait une paire de lunettes.
Elle nous répondit que son mari ne savait pas lire et qu'elle ne se servait pas de lunettes pour lire.
Je croyais bien d'y trouver des armes cachées le lieu étant fort suspect. Je n'ai pas cru devoir arrêter la femme du dit Nicolas, son mari étant absent".
Cette perquisition entraîna très certainement l'engagement de Joiny dans l'armée pour éviter la confiscation de ses biens.
Il y fit son apprentissage de canonnier et à son retour fabriqua des canons de bois (voir ci-contre)... qu'il rendit, en octobre 1704, lors de sa soumission.
Jouany défie les milices catholiques venues brûler sa tuilerie...
"Comme Jouany était bien monté, couvert d'un manteau rouge, coiffé d'une perruque et d'un chapeau galonné, on le prenait pour un officier des troupes du Roi."
Abbé Louvreleuil Tome 1
"Ce brigand qui voyait brûler la maison de son père, caracolant à la tête de son camp, sur le cheval blanc de feu Monsieur de Montlibert, commanda de chanter des psaumes".
Abbé Louvreleuil Mémoires
Jouany du Désert, le spectacle historique
Le canon fut reconstitué par les artisans de Génolhac, Claude Giraud, Guy Rabanit, Pino de Franco et l'ébéniste Rabah Mezguena de La Vernarède.
Il fut servi par deux directeurs de recherche du CNRS, Jean Noël Barandon et Pierre Rouillard, acteurs de la création collective "Jouany du Désert", interprétée par la population de Génolhac (110 bénévoles), en août 1985, sur la place des Ayres, à l'occasion du tricentenaire de la Révocation de l'Edit de Nantes.
> L'état des proportions - ci-dessus
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Les pièces du canon de bois ferré de fer provenant des camisards :
Pièce de 4
Longueur de 5 pied, 6 pouces
Grosseur de la volée : 1 pied, 6 pouces
Grosseur de la culasse : 2 pieds, 7 pouces
Encore "Aujourd'hui"... les canons de Jouany
Lors d'une visite aux archives de la guerre, à Vincennes, deux documents attirèrent l'attention des membres de l'association "la voie Régordane".
> Une lettre de l'intendant Basville au Ministre de la guerre (voir ci-dessous)
> Le rapport de l'officier ayant reçu la soumission de Jouany avec la restitution de ses deux canons.
La lettre de Basville au Ministre de la guerre
(ci dessous ; cliquez sur l'image pour l'agrandir)
"On a trouvé des armes dans plusieurs caches même deux canons que Jouany a enseigné ce sont deux pièces assez ridicules. Elles sont de bois avec des cercles de fer. Elles ont été faites par un Camisard qui a été bombardier".